La saga d'Égil, suite
Égil a quand même de bons côtés: il compose de jolis poèmes. Poèmes de circonstance, en l'honneur d'un roi, des élégies sur la mort de ses proches, une ode à son ami Arinbjorn, ou une rançon pour sauver sa tête. Parfois dur de comprendre son propos: il utilise des "kennings", sortes de métaphores codifiées à propos de batailles, guerriers, bateaux, épées....
Le nourisseur des loups: le guerrier - un éclabousseur d'or: un homme généreux -le seigneur des lances: Odin - le mordeur de blessures: la hache - le poisson de la vallée: le serpent....
Le don de la poésie provient d'Odin, dieu de la sagesse, de la magie et de la poèsie.
Sachant que les batailles et les orgies ne sont pas vraiment ma tasse de thé, comment expliquer que je l'aie cependant lu avec plaisir? le récit est alerte, il a un ton ironique qui fait parfois rigoler. On le lit un peu comme les batailles avec les Orcs. Tout cela ne paraît pas sérieux, c'est comme un jeu vidéo où il faut éliminer le plus possible d'ennemis. On est dans l'irréel. Il y a des hommes qui développent des forces surhumaines (les Bersekers), il y en a qui changent de forme la nuit et deviennent des loups garous ou des ours, il y a des troll parmi la lignée des hommes. il ne manque que les Elfes et les nains, et on est chez Tolkien. Il y a aussi de très belles pages sur l'amitié, la famille et l'honneur.
La première nuit en Islande, on l'a passée à Borgarnes et c'est là que le père d'Égil, Skallagrim, est censé s'être installé arrivant de Norvège en Islande. Ça crée des liens.. il y a toute une page sur les noms de lieux autour de Borgarnes qui existent encore aujourd'hui.
Et j'ai repensé aux fameux "Normands", venus s'installer en Normandie et qui ont fini par se civiliser peu à peu et je dois même descendre d'eux plus ou moins puisqu'une grande partie de ma famille était normande!
Un poème d'Égil
ma langue bouge difficilement
comme une limace
les écailles de mon poème
difficiles à soulever
la récompense donnée par Odin
échappe à mes mains
difficile d'extraire quelque chose
de mon cerveau hanté...
la déesse des mers
m'a ébouriffé
m'a dépouillé
de ceux que j'aimais
l'océan a rompu
mes liens de famille
ce nœud serré
qui me liait...
depuis que cet accès
de chaleur enragée (= la fièvre)
a fait disparaître du monde
celui qui était mon fils
de qui je savais
qu'il méprisait la disgrâce
et évitait toute parole
de mauvaise réputation...
Pour donner une petite idée.. Et j'ajoute une photo du Centre de poésie islandaise de Siglufjördur quand Th. m'expliquait l'amour des Islandais pour leurs Sagas. "Ce sont nos pyramides", disait-il.
Peut-être que je vous parlerai encore d'Halgrimur Helgasson, pour finir sur la littérature contemporaine...